Le ‘drainage’ ou ‘détox’ est hyper tendance chez les propriétaires de chevaux, et combien de fois peut-on voir, sur les étagères des selleries et graineteries, le fameux “bidon de drainage”, à utiliser deux fois par an ?
Mais avant de dépenser un fric monstrueux dans des produits naturels et de faire ingurgiter tout et n’importe quoi à nos chevaux, penchons nous sur des questions essentielles :
Qu’est ce qu’un DRAINAGE ?
Déjà, le terme drainage à trait à tout un tas de domaines. Globalement, drainer signifie : évacuer, écouler, faciliter l’élimination de.
En santé et médecine, drainer consiste généralement à évacuer manuellement (ou mécaniquement) un excédent de liquides, de gaz, de sécrétions, à l’aide donc, d’un tube, d’un endoscope, placé en interne, dans une plaie, sur un organe… BREF, vous l’aurez compris, dire que l’on “draine” l’organisme de nos chevaux est un abus de langage.
L’action que l’on cherche à provoquer par nos petites cures phyto s’apparente plutôt à une forme de DÉTOX (détoxification). Autrement dit, aider le corps à évacuer les toxines.
Les toxines, ce sont ces substances indésirables et néfastes, produites par des cellules, qui traversent et parfois logent dans notre organisme. Elles peuvent être endogènes (avoir une origine interne : métabolique, émotionnelle…) ou exogènes (origine externe : environnement, alimentation…) qui sont à l’origine de déséquilibres, de maladies.
Plusieurs organes sont chargés de la gestion des toxines dans l’organisme.
Déjà, les intestins font un premier travail de tri et d’évacuation lors de l’ingestion. Les poumons également, lors de la respiration. Mais quand les toxines passent les barrières digestives, respiratoires et cutanées (et atteignent donc notre sang), deux organes principalement ont un rôle important à jouer.
Le foie, et les reins.
Les reins ont un peu un rôle de filtre. Tout se passe à travers des tubes, ou tuyaux. Grosso modo, les reins reçoivent le sang, ils envoient la partie néfaste et indésirable, ou toxique, vers le système urinaire pour l’élimination, et renvoient la partie correcte, ou saine dans le système sanguin (qui, par la suite, fait son propre chemin).
Le foie, lui, a un rôle un peu plus complexe. Il n’est pas seulement un filtre, mais aussi comme une station de stockage et d’épuration. Il participe à la digestion (production d’enzymes digestives), au métabolisme, au système immunitaire, au stockage de l’énergie (vitamines et glucides), à la gestion des globules… et au processus de détoxification. Il ne trie pas seulement les toxines, il les transforme. Et les achemine ensuite (via le sang) vers les reins, et etc. Et cette transformation prend du temps. Ce qui implique la possibilité d’une surcharge.
En médecine chinoise, on a tendance à ne drainer les reins que dans de très rares cas. Partant de l’image qu’il s’agit d’un filtre, on imagine que si il y a une dysfonction au niveau des reins c’est : soit que l’organe est fatigué, affaibli, auquel cas il faut le renforcer (et pas le nettoyer), soit que le sang, lui, est excessivement chargé, et donc que probablement, l’organe en amont chargé de sa transformation a merdouillé… (oui, vous me voyez venir).
La capacité de filtration des reins aurait un lien avec l’état d’hydratation de l’animal (conditionné lui même par ses apports en électrolytes notamment).
Pour le foie, c’est un peu différent. Comme il stocke, et met du temps à transformer, il peut être amené à être surchargé, à prendre du retard dans son travail (oui oui, vous pouvez imaginer la pile de dossiers qui s’accumulent sur le bureau). Soit, parce qu’il est épuisé et au bord du burn-out, soit parce que trop de dossiers complexes sont arrivés d’un coup. Et c’est là qu’il peut être intéressant de venir l’aider. Non pas en balayant du bras tous les dossiers posés sur son bureau, mais en stimulant sa capacité à gérer ces dits dossiers. Soit, on lui file un coup de main pour gérer quelques dossiers (détox), soit on lui paie une cure de vitamines pour le remettre en forme (soutien).
J’espère que ma métaphore archi poétique vous plaît, ou du moins vous parle.
En gros, vous l’avez compris, on peut agir de plusieurs manières sur ce foie :
– En soutien : avec des substances (ou des techniques manuelles) qui vont favoriser la régénération des cellules (quand l’organe est fatigué)
– En détox : avec des substances (ou des techniques manuelles) qui vont accélérer le fonctionnement de l’organe et sa capacité dépurative (quand l’organe est surchargé)
Forcément, vous imaginez que si vous vous mettez à détoxifier un organe à plat qui est déjà au max de sa capacité, c’est comme si vous tachiez d’aider Chantal de la compta, au bord du burn-out, à gérer ses dossiers en nettoyant son bureau à coup de karcher. Déjà, ça va faire disjoncter l’électricité dans tout le bâtiment. Mais en plus, demain, vous trouverez une fiche d’arrêt maladie sur votre bureau, et Chantal ne viendra plus bosser.
Bref, trêve de plaisanterie et de comparaisons amusantes… Nécessairement et logiquement, vous avez saisi : faire un drainage ne s’improvise pas. Parce que ça peut faire plus de mal que de bien. Et que c’est surtout pas parce que c’est “que des plantes” ou “que des techniques manuelles douces” qu’il n’y a pas de risques.
Voici les questions à se poser :
- Qu’est ce qui me fait penser que mon cheval a besoin d’une détox ? (fatigue, maladie, difficultés d’élimination…)
- Quel est l’organe qui semble dysfonctionner ?
- Cet organe là, est-il plutôt en surcharge de travail, et/ou (parce qu’évidemment, l’un finit par engendrer l’autre) complètement à plat ?
- Est-ce le bon moment pour travailler dessus (saison, période…) ?
- De quelle action ai-je besoin (régénération, dépuration, stimulation…) ?
- Est-ce qu’une technique manuelle peut avoir cette action ?
- Quelle est ou quelles sont les molécules ayant ces propriétés ?
- Dans quelles plantes (ou autres substances) puis-je retrouver ces actifs ?
- De quelle dose mon cheval a-t-il besoin ?
- En cas de mélange, suis-je bien certain(e) que ces substances sont compatibles, et présentent une synergie intéressante ? (90% des produits sur le marché sont composés de 15 plantes, aux actions parfois contradictoires…)
Si vous ne parvenez pas à répondre à toutes ces questions, c’est que vous avez besoin d’être conseillé par un professionnel. Tout simplement.
Mais alors, comment savoir que j’ai un déséquilibre au niveau du foie ?
Le vétérinaire est, of course, le seul et l’unique à être apte au diagnostic. Pour ça, généralement, une prise de sang avec une biochimie peuvent nous indiquer que les paramètres hépatiques sont anormaux. Pour ça, il faut que le taux de déséquilibre soit suffisamment important.
On sait que certaines pathologies affectent le fonctionnement du foie (piroplasmose, maladie de lyme…).
Certains signes cliniques peuvent nous alerter également : muqueuses jaunes, fatigue extrême, difficulté à prendre de l’état…
Et enfin, votre ostéopathe ou praticien en techniques manuelles peut relever un potentiel déséquilibre viscéral également.
Quoi qu’il en soit, aujourd’hui des recherches sont en cours pour déterminer si la « détox » a de véritables bienfaits ou si elle n’est qu’un argument marketing. Il est difficile de trouver des publications scientifiques sur le sujet. Si vous avez un doute, référez vous à votre vétérinaire, réalisez une analyse sanguine, choisissez un produit cohérent, puis, vérifiez l’impact sur votre cheval.
Je vous livre ici le fruit de mes lectures, apprentissages, formations (en anatomie, physiologie, naturopathie…), et ma propre analyse logique.
Et comme tout, cet article a vocation a évoluer.